L’acidification de l’océan est un des sujets clés du réchauffement climatique quand on parle de l’équilibre de la planète, et de climat, de réchauffement climatique. Mais concrètement que se cache-t’il derrière ce terme technique et souvent mal compris ? À quoi correspond l’acidification de l’océan ? Peut-on agir pour atténuer ce phénomène ? Comment mettre la main à la pâte ? Quelles sont les perspectives pour les années à venir ? L’homme est-il responsable de l’acidification des océans ? On vous dit tout dans cet article.
📷 Victor Gomera
🪶 Diane Fastrez
Les rôles de l’océan sur le climat
La notion de puits de carbone
Un puits de carbone est un écosystème naturel ou artificiel qui capte le CO² et le stocke. Concernant les puits de carbone naturels, il y a par exemple les forêts, les marais côtiers, le bocage mais aussi l’océan.
Ce dernier joue un rôle à trois niveaux :
- absorber le CO²
- limiter l’effet du réchauffement climatique
- libérer de l’oxygène dans l’atmosphère et permettre la vie sur terre
En bref, les puits de carbone sont des alliés de taille.
Zoom sur la notion de CO²
Le CO², ou dioxyde de carbone, est un gaz à effet de serre qui participe au réchauffement climatique en empêchant certains rayons du soleil de repartir dans l’espace. Il est à l’origine, naturellement présent dans l’atmosphère. En revanche, la quantité de CO² que l’on trouve dans l’atmosphère ne cesse d’augmenter depuis l’ère industrielle et c’est ce qui est problématique.
Le double effet kiss cool de l’océan
Les océans jouent un rôle clé dans la régulation du CO² sur notre planète. À eux seuls, ils capteraient environ 30% du CO². Comment ? Via deux procédés :
- La molécule de CO² se dissout : elle intègre ainsi l’eau (H²O). C’est le même procédé que pour la fabrication d’une boisson gazeuse.
- Le phytoplancton et les algues : ces végétaux microscopiques (aux noms aussi imprononçables et impossibles à retenir que diatomées, les dinoflagellés, haptophytes ou encore chrysophytes) absorbent le CO² présent dans l’atmosphère pour exercer leur photosynthèse. En d’autres mots ? C’est comme une forêt sous-marine.
💡 Bon à savoir : on connaît souvent le rôle de la biomasse dans la régulation du climat. Pourtant, les algues sont encore plus efficaces que les plantes terrestres. Oui, vous avez bien lu ! Ces dernières capturent 4 fois plus de CO². Mieux encore, il leur faut moins de temps pour pousser. Sauf qu’avec l’acidification de l’océan, l’avenir de ces algues est mis à risque.
Pourquoi l’acidification de l’océan n’est pas une bonne nouvelle ?
Vous vous en doutez, si ça mérite un article (et des milliers d’actions et d’heures de sensibilisation), c’est que l’acidification de l’océan est loin d’être une bonne nouvelle. Explications.
La mise à risque des milieux aquatiques
L’enjeu ? Cela a un impact direct sur la vie sous-marine. En effet, beaucoup d’espèces sont sensibles aux changements de l’acidité de leur habitat aquatique.
Cet acidité ramollit les coquilles des fruits de mers comme les coquilles Saint-Jacques et les huîtres, ralentit la mue des crabes et des homards, affaiblit les coraux et leur capacité à se renouveler, trouble les poissons en perturbant leur sens de l’odorat, modifie la façon dont les sons se transmettent sous l’eau et augmente l’intensité de l’environnement sonore, affaiblit beaucoup d’espèces marines qui résistent moins aux maladies, etc. Bref, vous avez l’idée. Pas besoin de faire une liste exhaustive de toutes les conséquences.
Les projections futures
L’avenir nous réserve encore plus de défis. D’ici 2050, les scientifiques estiment que 86 % de l’océan mondial sera plus chaud et plus acide qu’aujourd’hui (et que jamais auparavant). D’ici 2100, le pH de l’océan de surface pourrait chuter à moins de 7,8. Il est à 8,1 aujourd’hui. Ça peut paraître infime et pourtant. Mais le moindre changement impacte l’ensemble de la biodiversité et rebat les cartes des conditions de vie sur terre.
Ce qu’il faut retenir ? Le poumon bleu s’essouffle et cela impacte toute la planète.
Qu’est-ce que l’acidification de l’océan ?
Les causes de l’acidification de l’océan
Nous l’avons évoqué plus haut, l’océan absorbe naturellement le CO².
C’est donc à l’origine un phénomène naturel. En d’autres mots, cela a toujours été là sur Terre. Le problème vient de l’activité anthropique, donc des hommes. La présence de CO² dans l’atmosphère augmente en continu et vient amplifier l’effet de serre. En absorbant plus de 30% des émissions de dioxyde de carbone dues aux activités humaines, l’océan réduit le pH de la mer. Résultat ? Depuis la fin des années 1980, 95 % des eaux océaniques de surface en haute mer ont vu leur acidité augmenter.
Ce qu’il faut retenir : Environ un tiers du dioxyde de carbone (CO²) généré par les activités humaines (industrie, logistique, consommation, etc…) a été absorbé par l’océan depuis le début de la révolution industrielle. C’est bien, mais pas illimité. Les conséquences sont désastreuses, nous y reviendrons dans la suite de cet article.
Au fait, qu’est-ce que le pH et l’acidité ?
Le pH est la mesure de l’acidité d’une solution. Il indique la concentration en ions hydrogène (H+) et en ions hydroxyle (OH-) sur une échelle de 0 à 14.
Quelques éléments pour mieux comprendre :
- L’eau potable (pH 7) est considérée comme neutre (ni acide ni alcaline)
- Si le pH est inférieur à 7, on dit que la solution est acide
Le jus de citron a un pH de 2,2, le vinaigre de 2,4, ils sont considérés comme acides - Si le pH est supérieur à 7, on dit que la solution est alcaline.
- L’échelle de pH est dite logarithmique. Cela veut dire qu’un pH inférieur d’une unité indique une eau dix fois plus acide.
Avant la révolution industrielle des XVIIIe et XIXe siècles, le pH des océans était d’environ 8,2. Il est maintenant de 8,1. Selon le sixième Rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), le pH des océans pourrait descendre à 7,8 environ d’ici 2100. Cette situation rendrait les océans 150 % plus acides et affecterait la moitié de la vie aquatique.
💡 Bon à savoir : Le terme « acidification » indique un processus en cours – la modification du pH – mais l’océan ne deviendra pas un milieu fondamentalement acide.
Quelles sont les conséquences de l’acidification de l’océan ?
Deux conséquences principales émergent :
- Une menace pour les écosystèmes marins : un risque pour les organismes dits calcifiants donc avec des coquilles et/ou squelettes (huîtres, crabes, oursins, homards, coraux, etc.). Ces derniers vont dépenser plus d’énergie pour résister aux conditions plus acides et mettre au second plan leurs processus physiologiques (reproduction, croissance, etc.). Cela peut mener à leur extinction et impacter l’ensemble de la chaîne alimentaire.
- Une menace pour les populations : pour commencer, cela impacte directement ceux qui tirent leur revenus de l’océan (pêche, transport, etc…) et ceux qui se nourrissent grâce à l’océan. Et en chiffres ça donne quoi ? Plus de trois milliards de personnes dépendraient aujourd’hui de la biodiversité marine et côtière.
Où en est la France au sujet de l’acidification de l’océan ?
La France est responsable de 1 % des émissions mondiales de CO². Elle joue donc un rôle dans l’acidification de l’océan. Or, la France a un lien particulier avec l’océan :
- c’est 11 millions de km² de zones économiques maritimes exclusives
- c’est environ 20 % des atolls dans le monde
- c’est 10 % de la totalité des récifs de la planète (ce qui la place au 4ème rang mondial)
- c’est plus 5 000 km de zones côtières
Bref, on est aux premières loges des conséquences de l’acidification de l’océan. Cette évolution va impacter les conditions de vie des françaises et des français, mais aussi l’économie sur le long terme. Il est donc essentiel d’agir. Et d’agir vite. Et de manière ambitieuse. D’autant que la France possède le 2ème plus grand espace maritime mondial, après les USA. Donc si nous ne le faisons pas, qui le fera ?